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10 juin 2013 1 10 /06 /juin /2013 07:22
Séance 5 : La condition politique ou la requalification du pouvoir de « commencer »

Office du tourisme de Grenoble, vendredi 14 juin 2013, à partir de 18 h 30

 

Cette dernière séance du cours consiste en une lecture des textes où Arendt se montre "engagée".

 

La notion d’engagement apparaît fondamentale pour toute la philosophie existentialiste : pour Arendt comme pour Sartre et pour bien d’autres, l’expérience de la liberté se joue dans la décision personnelle, laquelle transforme les événements, d’abord extérieurs à moi et sans signification particulière, en quasi destin. Si bien que l’engagement forge la subjectivité authentique tout en mettant à l’épreuve la capacité de responsabilité. Mais dans la pensée arendtienne il prend un sens particulier car grâce à lui ne se joue pas seulement l’apparition de la subjectivité libre : il réalise la faculté à créer un monde commun. L’engagement dans l’action a pour horizon la possibilité d’une société humaine au sens plein et entier du terme.

Or, il est remarquable que les textes où Arendt est engagée concernent ses prises de position publiques sur des questions sensibles, et où se joue sa participation en tant que citoyenne à la vie US. Le « journalisme philosophique » d’Arendt acquiert de ce fait un relief tout-à-fait particulier. Le contexte de ces prises de position est spécial : ségrégation raciale et lutte pour la reconnaissance des droits civiques, guerre du Viet Nam et manifestation de la raison d’Etat impérialiste, tentation de la « désobéissance civile » et de l’action violente de la part des militants de la contre-culture. Ce contexte est de surcroît appréhendé par Arendt comme l’entrée en crise d’un modèle de vie politique dont elle reconnaissait pourtant le caractère exemplaire (ainsi qu’elle l’a expliqué dans son Essai sur la Révolution de 1963).

Philosophant à même l’événement, Arendt confère un sens nouveau à l’existentialisme : d’une part, la réalité de la condition politique se joue dans la capacité à « commencer » ; de l’autre, le contexte de troubles sociaux fait bouger les lignes idéologiques et déconcerte les esprits, mais il est propice à l’exercice renouvelé de la faculté de juger.

Lecture par Gilbert Dombrowsky d’un choix de textes extraits de :

  • « Réflexions sur Little Rock » (1959) in Responsabilité et jugement
  • « Vérité et politique » (1968) in La Crise de la culture
  • Crises of the Republic, 1972 : le dernier ouvrage publié par Arendt, trad. fr. Du Mensonge à la violence. Essais de politique contemporaine.

 

« Liberté et événement : la source de la liberté, qui s'exprime par la spontanéité – pouvoir commencer une série à partir de soi-même –, est l'événement. C'est lui qui procure pour ainsi dire à la liberté le matériau à partir duquel seulement la spontanéité peut s'enflammer. C'est seulement dans l'événement lui-même, et à vrai dire indépendamment de toutes les considérations prévisibles, que se prennent les rares décisions fondamentales dont je sais qu'elles étaient libres, du fait que je ne peux pas les révoquer. Il n'est pas vrai que tout dans la vie soit irrévocable ; la plupart des choses sont révocables, peuvent être réparées, et ce précisément du fait que qu'on n'en a pas décidé librement mais sous la force de contraintes intérieures ou de circonstances extérieures. En les invoquant, on s'excuse également d'abroger, à juste titre, les décisions. On reconnaît la liberté au caractère irrévocable d'une décision prise. »

Hannah Arendt, Journal de pensée, 1950-1973, trad. S. Courtine-Denamy, Paris, Le Seuil, 2005, Cahier IV (juin 1951), § 18, volume I, p. 112-113

 

Cours public sur Hannah Arendt : 5ème séance
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